Les causes profondes du chômage des jeunes en Côte d’Ivoire

Le chômage des jeunes en Côte d’Ivoire est un problème majeur qui freine le développement du pays et accentue les inégalités sociales. Bien que le taux officiel de chômage des 15-24 ans soit en baisse, passant de 13,8 % en 2019 à 13 % en 2023, ces chiffres cachent une réalité plus complexe.

En effet, beaucoup de jeunes sont piégés dans l’emploi informel, sans contrat ni protection sociale. Près d’un jeune sur cinq ne travaille pas, n’étudie pas et ne suit aucune formation.

Ainsi, plusieurs facteurs expliquent cette situation préoccupante. Tout d’abord, l’inadéquation entre la formation et le marché de l’emploi constitue un frein majeur. Ensuite, la faible industrialisation limite la création de postes stables. Par ailleurs, l’accès restreint aux financements et l’héritage des crises politiques compliquent encore davantage l’insertion des jeunes dans le marché du travail.

Cependant, des solutions émergent, portées par des politiques publiques innovantes, la montée de l’entrepreneuriat numérique et le soutien des partenaires internationaux.

État des lieux du chômage des jeunes en Côte d’Ivoire

Si le gouvernement affirme que les initiatives mises en place ont contribué à réduire le chômage, la réalité montre une situation plus contrastée. :

D’une part, 56,6 % des jeunes en quête d’emploi se trouvent à Abidjan, où le taux de chômage dépasse 21 %. D’autre part, 77,3 % des emplois se situent dans le secteur informel, sans aucune garantie de revenu stable ni de protection sociale. De plus, la pandémie de COVID-19 a considérablement aggravé la situation. De nombreux secteurs comme le commerce, le tourisme et la restauration ont été durement touchés, entraînant des pertes massives d’emplois.

Il est important de souligner que la Côte d’Ivoire possède une population très jeune. Avec 77,3 % des habitants âgés de moins de 35 ans, le pays connaît une augmentation rapide du nombre de jeunes en quête d’emploi.

Or, cette croissance démographique pose un sérieux défi. D’un côté, environ 3 millions de jeunes sont activement à la recherche d’un emploi. De l’autre, le système éducatif peine à absorber ces nouveaux arrivants.

En 2023, seulement 296 000 étudiants étaient inscrits dans l’enseignement supérieur, un chiffre insuffisant pour répondre aux besoins du marché du travail.

Ainsi, la concurrence pour les emplois formels devient de plus en plus féroce, poussant de nombreux jeunes vers l’économie informelle.

Un système éducatif inadapté au marché du travail

L’une des principales causes du chômage en Côte d’Ivoire est le décalage entre la formation académique et les besoins des entreprises.

  • 15 % seulement des diplômés ont une formation technique adaptée.
  • 85 % des chômeurs urbains ont un niveau inférieur au baccalauréat.
  • Les filières professionnelles ne couvrent que 8 % des besoins en main-d’œuvre qualifiée.

L’économie est dominée par le secteur informel.

  • 8 emplois sur 10 sont informels, sans sécurité sociale ni stabilité financière.
  • Les salaires y sont souvent inférieurs au SMIG (75 000 FCFA/mois).
  • Un travailleur peut perdre son emploi du jour au lendemain, sans recours possible.

Malgré un intérêt croissant pour l’auto-emploi, les jeunes entrepreneurs font face à :

  • Taux d’intérêt bancaires élevés (12 à 18 %).
  • Procédures administratives complexes.
  • Accès limité aux marchés publics.

Résultat : seulement 5 % des start-ups survivent au-delà de trois ans.

Conséquences du chômage des jeunes en Côte d’Ivoire

Le chômage prolongé nourrit un sentiment d’inutilité sociale, particulièrement dans les régions du Nord touchées par le terrorisme transfrontalier. Une étude de l’OIT note que 34 % des jeunes chômeurs envisagent l’émigration clandestine, tandis que les groupes djihadistes exploitent cette frustration pour recruter. À Abidjan, la délinquance juvénile a augmenté de 22 % entre 2020 et 2024 selon les données policières.

Les jeunes femmes ont encore plus de mal à trouver un emploi stable. Leur taux de chômage est 7 % plus élevé que celui des hommes, et elles sont surreprésentées dans les métiers précaires (comme la vente).

Politiques publiques intégrées 

Le Programme Jeunesse 2023-2025 articule trois axes majeurs :

  1. Insertion professionnelle via l’Agence Emploi Jeunes, guichet unique ayant placé 45 000 jeunes en 2024.
  2. Financement entrepreneurial à travers le Fonds d’Appui aux Jeunes (FAJ), doté de 15 milliards FCFA.
  3. Développement technologique

Le Projet de Soutien à l’Innovation Entrepreneuriale (PSIE), en partenariat avec le PNUD, vise à accompagner 100 000 porteurs de projets via des prêts à taux zéro.

La lutte contre le chômage des jeunes en Côte d’Ivoire exige une approche combinant réformes éducatives audacieuses, diversification économique et inclusion numérique. 

Les avancées récentes montrent la voie, mais des défis persistent : informalité, inadéquation des compétences, fractures régionales. Comme le résume le ministre Mamadou Touré : « L’innovation entrepreneuriale n’est pas une option, mais une obligation pour transformer le dividende démographique en moteur de croissance ».